ADDICTIONS : UN ENJEU DE SANTE PUBLIQUE ET DE PREVENTION POUR LES ASSUREURS – Synthèse du petit-déjeuner du 19 septembre 2024

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Les addictions aux substances psychoactives seraient à l’origine d’environ 110 000 morts par an en France, dont un tiers des décès chez les moins de 65 ans. C’est la première cause de mortalité évitable. Plus de la moitié des Français ont déjà consommé du cannabis et près de 15 % d’autres drogues. Au-delà de décès prématurés, la santé mentale est affectée et ce sont des années de travail perdues et des familles détruites. Comment fonctionnent les addictions ? Quelle est la situation de la France aujourd’hui ? Quels sont les moyens de prévention efficaces pour réduire les risques d’arrêts de travail ? Quel rôle des assureurs peuvent-ils jouer ?

Alexis Peschard, addictologue, apporte son éclairage …. Président fondateur de GAE Conseil, société spécialisée dans la prévention des addictions, il a pratiqué en milieu hospitalier et en libéral. Depuis plus de 10 ans, il conseille les entreprises et les assureurs sur la prévention des addictions.

1/Des addictions plus mortelles que la pollution ou le COVID

  • En tête des décès prématurés consécutifs à des addictions en France : le tabac et l’alcool, avec respectivement 71 000 et 41 000 décès par an environ.
  • Les addictions ont impact plus important que la pollution atmosphérique (40 000 décès par an) ou le Covid-19 (69 000 décès en 2020), selon Santé publique France.
  • Autre impact de la consommation excessive d’alcool chez la femme enceinte : 1 enfant sur 1 000 est atteint du syndrome de l’alcoolisme fœtal.
  • Dans les familles, 30 % des condamnations pénales et ¼ des violences conjugales sont liées à l’abus d’alcool qui engendre aussi des risques professionnels.
  • Selon l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), si le cannabis demeure la drogue illicite la plus consommée (10,8 % au cours des 12 derniers mois) et que les jeunes restent les plus concernés, sa consommation augmente chez les plus âgés. Son usage reste stable depuis 10 ans mais l’expérimentation et l’utilisation de stimulants, notamment la cocaïne (et 400 substances de synthèse illicites), sont en forte hausse.
  • La consommation de substances illicites se banalise et selon le baromètre 2023 de l’OFDT actualisé en juin 2024, la consommation de cocaïne et autres substances de synthèse illicites aurait été multipliée par deux entre 2015 et 2023, passant de 5 % à 10 % !
  • Sont particulièrement concernés par la montée des addictions : les jeunes, les femmes et les publics éloignés de l’emploi.

2/ Face à la montée des addictions : la prévention primaire en entreprise

  • La montée en puissance des addictions, y compris aux substances illicites, est telle que les entreprises ne peuvent plus se retrancher derrière un sujet de vie privée ne relevant pas de l’organisation de l’entreprise.
  • La sanction disciplinaire ou le licenciement à l’encontre de salariés après un dépistage ne constitue plus une réponse suffisante.
  • Citant le cas d’une entreprise industrielle aux conditions de travail pénibles ayant subi, en 2021, un débrayage parce que la consommation d’alcool y avait été totalement interdite dans le règlement intérieur à la suite d’un décès dramatique d’un salarié en état d’ébriété. La consommation d’alcool pour « tenir » était en effet considérée comme un acquis social. Dans cette entreprise, la prévention primaire et la pédagogie ont permis au bout d’un an de faire accepter par les syndicats de salariés d’encadrer la consommation d’alcool (au cours d’événements, en quantités contrôlées et avec de la nourriture).
  • Depuis la crise Covid, la demande des entreprises pour enrayer le phénomène des addictions ne concerne plus seulement l’industrie, le BTP ou le Transport & la Logistique (avec des métiers pénibles et une prise de conscience du risque de sécurité).
  • Dans les métiers du tertiaire, des DRH n’arrivent plus à gérer le problème des addictions par des réponses individuelles, face à des salariés qui perdent pied, des tentatives de suicides, les violences conjugales….
  • Les barrières entre la vie privée et la vie professionnelle ont cédé depuis les confinements avec le télétravail. Les entreprises en ont pris conscience dès 2021.
  • Hyper-connexion ; pertes de repères ; épuisement professionnel : le virage de la prévention doit s’insérer dans une démarche plus globale. Des actions ponctuelles lors du « mois sans tabac » ne suffisent plus.
  • Une prévention ciblée s’impose, avec des messages percutants adaptés aux addictions qui peuvent varier selon les secteurs et les métiers.
  • Pour améliorer sa situation, l’entreprise doit questionner son organisation et vraiment agir pour prévenir le phénomène, car le travail protège les actifs en emploi.

3/La prévention à l’hyper connexion pour limiter le risque de burn out

  • Les addictions au tabac, alcool et aux substances illicites ne sont pas les seules à mettre en péril la santé des salariés.
  • L’addiction aux écrans – la plus répandue – est la plus banalisée et donc la mieux admise. Mais quand elle échappe à tout contrôle, elle peut aussi aboutir à la maladie. Il faut donc dépasser la banalisation de l’usage de l’outil et arrêter de nier que l’hyper connexion a un impact psychologique destructeur qui peut déboucher sur un burn out, une hospitalisation et un arrêt de travail de plusieurs mois. Et l’erreur est de penser qu’à 30 ans, la jeunesse protège de ce risque.
  • Pour qualifier l’addiction, tout est une question de curseur et donc de degré de sévérité. Il existe 11 critères pour qualifier une addiction, de modérée à sévère, avec au moins 2 critères pendant 12 mois consécutifs.
  • Pour sensibiliser et infléchir les comportements, les conférences théâtralisées avec des témoignages de personnes qui se sont remises d’addictions sévères (patients experts) se révèlent efficaces pour infléchir des conduites addictives souvent non identifiées.
  • Ecouter son entourage (famille, amis…) sur un changement de comportement permet aussi d’objectiver l’hyper connexion ou l’addiction au travail, par exemple.
  • Il existe d’autres révélateurs ou signaux : un retrait de permis de conduire, de mauvais résultats à des analyses de sang, des troubles du sommeil, des épisodes de déprime ou certains problèmes dentaires (le bruxisme nocturne sévère, par exemple).
  • Les services de santé au travail dans les grandes entreprises sont des relais mais dans les TPE et PME, les effectifs sont nettement insuffisants. En outre, l’orientation de la médecine du travail vers des spécialistes est freinée. En nombre insuffisant, ils ne couvriraient qu’entre 15 et 20 % des besoins d’accompagnement. Il est nécessaire de fluidifier les parcours de soins et élargir l’offre. L’e-santé peut apporter une amélioration du service de prévention.
  • Autre piste de solutions : développer le langage des émotions dans les entreprises.

 

 

Vous pouvez consulter le site de GAE conseil : https://gaeconseil.fr/

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